Carbon Based Lifeforms, c’est avec Solar Fields l’un des deux actes musicaux qui m’ont fait entrer dans la musique électronique que j’explore depuis désormais presque 15 ans. Une véritable histoire d’Amour que je continue à entretenir avec passion en réécoutant toujours avec plaisir leurs premiers albums. Ultimae Records à son climax quoi. J’avais déjà eu la chance de voir le duo suédois il y a quelques années sur le plateau du Vercors, pour le Hadra Festival ; les voir revenir exceptionnellement en France à La Marbrerie était donc une occasion à ne pas rater.

En arrivant durant le warm-up, je pensais être en réalité un peu déçu du live, imaginant que Daniel Vadestrid et Johannes Hedberg allaient en profiter pour surtout présenter leur dernier album Seeker, qui m’en a touché une sans bousculer l’autre. Trop ambient, pas aussi texturé, moins de mélodies qui collent aux cages à miel, la galette m’est un peu passé au-dessus. En attendant le début du concert, je me laisse porter par la musique de fond, jouant à reconnaître ce qui est diffusé : leurs sons bien sûr, mais aussi des pistes de leur pote Magnus Birgersson, pour mon plus grand plaisir. Puis vient sans prévenir Scappa d’Alessandro Cortini, annonçant l’arrivée imminente de Carbon Based Lifeforms sur la scène. Ça attaque de manière ambient pour nous mettre dans l’atmosphère organique propre du groupe, toujours étirée entre l’océan et l’espace avec ses notes immédiatement reconnaissables du TB-303 de Roland. Et ensuite, j’ai plongé dans un set de plus de deux heures qui a enchaîné les gros morceaux de leur discographie en mettant finalement Seeker en arrière-plan. Et ce fut beau, très beau. Y a eu évidemment des indispensables tels MOS 6581 ou Photosynthesis en versions remixées pour l’occasion, mais aussi des choix moins évidents et plus que bienvenus : Hydroponic Garden, Supersede ou Derelicts pour ne citer qu’eux. Une revisite de leur héritage qui m’a replongé dans mes meilleurs souvenirs du downtempo à la sauce scandinave.

Les projections psychédéliques en arrière-plan ont transporté la salle entière dans les territoires en impesanteur de CBL, mettant tout le monde d’accord avec une ambiance bon enfant du début à la fin du show. Difficile de résister à fermer les yeux en trémoussant sa tête et son boule au son de tellement de tubes qui célèbrent les rythmes plus lents pour profiter encore plus des compositions stratosphériques des deux gaziers du psybient, qui semblent s’enjailler au moins autant que le public présent devant eux. Petit bémol peut-être, j’aurais préféré un live mixé du début à la fin pour ne jamais briser l’ambiance luxuriante dessinée par la musique, plutôt que de séparer clairement les morceaux et applaudir entre chacun d’eux. Mais malgré ça, la magie électronique déroulée ce soir-là aura vite fait de cacher ce léger faux pas, emportant ses témoins en territoires acido-organiques aux mille et unes couleurs. Planant comme je l’attendais, et faisant vibrer la corde nostalgique comme je ne l’espérais pas. J’ai cru entendre des sons inconnus aussi, me faisant croire à des tests face à une salle pour un hypothétique prochain album. Y a même eu un premier bis demandé par le public, et un second que l’équipe technique n’avait pas prévu, se soldant en un magnifique doigt d’honneur du groupe à la régis son pour leur dire que s’ils sont pas contents, ils pouvaient rentrer chez eux. Et mention spéciale au T-shirt Stigbergets de Johannes Hedberg, montrant qu’en plus de faire de la musique intemporelle, Carbon Based Lifeforms aime aussi la très bonne bière artisanale.

Ce qui m’a finalement le moins plu durant ce live ? Quelques énergumènes du public se prenant régulièrement pour des macaques hurleurs et des siffleurs fous, me donnant des foutus acouphènes à la sortie de la salle. Si vous vous reconnaissez, allez pourrir en enfer. Mais bon, c’était définitivement pas suffisant pour me faire oublier la belle soirée que je viens de passer en compagnie d’un des piliers fondateurs de mes goûts musicaux actuels.
Dotflac