Je le dis à chaque fois que je chronique un EP mais j’m’en fous, je le redis quand même : j’aime pas les EP. J’aime pas ce format batârd qui en dit soit trop soit pas assez. Mais il arrive qu’un EP surmonte le piège de son propre format court pour proposer 4 ou 5 titres qui forment un ensemble d’une cohérence et d’une solidité suffisante pour qu’il puisse être envisagé comme oeuvre à part entière et pas juste comme un sale teaser du prochain album à venir.
Alors comme c’est le cas aujourd’hui, on va pas s’priver pour en parler. Et puis il faut avouer que Broken Note, c’est un peu le dernier des mohicans de ma période « bass music à tendance steppée ». Son album est probablement l’un des derniers de cette mouvance que j’arrive encore à écouter sans éprouver cette honte, celle qui te fait dire « roooohh… quand je pense qu’il y a encore un an j’écoutais cette merde… »
Il faut dire que son seul format long, Terminal Static, que nous n’avions évidemment pas chroniqué, a été (ou devrait être) catapulté au rang d’oeuvre dite de catégorie « c’est qui papa ? ». En cette sainte année 2009, Broken Note nous offrait via Ad Noiseam 13 morceaux oscillant entre dubstep noir et drum’n’bass acerbe, plus crasseux que le premier album de Mobthrow (qui était très bon aussi, en passant), à l’époque où l’affreux Gore Tech n’était pas encore sorti des gonades de son géniteur. Et depuis, Terminal Static a vieilli comme une bonne bouteille de Sancerre.
Après ça, l’anglais a sorti une multitude de formats courts sur différents labels tels que PRSPCT, Subtrakt ou Boka, et évidemment, Ad Noiseam. J’avoue que je les ai pas tous écoutés.
Aujourd’hui, après deux ans de silence, Broken Note nous revient chez Ad Noiseam avec Black Mirror. Et c’est avec grand plaisir que l’on déguste à nouveau les basses mortelles (kikoo le jeu de mot pourri), les wobbles grinçants, les silences placés où que ça fait bien. On peut disserter pendant quelques heures autour d’une bouteille de rhum arrangé aux racines avant de décider si le son de Broken Note raye plus qu’il ne tâche, mais ça c’est du bonus. En attendant, Black Mirror c’est quatre morceaux parfaitement construits (sauf Descent qui est un peu trop borné du genou à mon humble avis), d’une musique noire et sale qui pourtant ne se vautre pas dans la boue juste pour le plaisir de la déchéance. Il y a véritable travail sur la structure, les textures et les ambiances (trop souvent oubliées ailleurs) qui nous éloigne de la sempiternelle et autiste consommation de beats binaires et bornés, qui est ce vers quoi tendent de plus en plus de productions dans le domaine.
Broken Note est un de ces gars qu’on aimerait entendre plus souvent. Un de ces trop rares garçons qui font que le terme « bass music » veut dire un peu plus que « concours de violence gratuite ». Black Mirror est, comme la majeure partie de sa discographie, une preuve qu’une bass music noire et acerbe peut être fine, léchée et travaillée au cure-dent. Il prend son temps, le bougre, mais finalement c’est pas plus mal. Pis en attendant la suite, on peut toujours se remettre Meltdown.
Black Mirror, c’est chez Ad Noiseam. Evidemment. En digital ou en grosse galette noire. Pas cher. Joli. Pour aller avec le café du matin du petit furieux (ou du stakhanoviste du CDD) qui est le dernier à rester au bureau en plein mois d’août.
Ehoarn
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